1947

Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! – LA LUTTE de CLASSES – Organe de l'Union Communiste (Trotskyste) n° 88 – 5ème année – bimensuel (B.I.) le n° 4 francs


LA LUTTE DE CLASSES nº 88

Barta

12 avril 1947


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Deuxième étape

Depuis la manifestation gaulliste de Strasbourg et la création du R.P.F., le Gouvernement, en la personne de son chef, et toute une partie de la troupe de politiciens dont hier encore De Gaulle était le drapeau, condamnent ou se désolidarisent de son action actuelle.

Les uns, les "démocrates", découvrent que De Gaulle est anti-démocratique, seulement maintenant que celui-ci, en voulant supprimer les partis, met en danger leurs places et leurs avantages. D'autres, comme le M.R.P. ou Le Monde, parce qu'ils craignent que la guerre civile qui doit en résulter pourrait tourner au désavantage de la bourgeoisie.

Cependant, l'action anti-démocratique de De Gaulle a commencé déjà quand, en 1945, il réussit à écarter l'élection d'une Assemblée Constituante Souveraine au moyen d'un pseudo-référendum, et à la remplacer par la série des Parlements-croupions que nous connaissons depuis 18 mois.

Mais tous les partis, soit directement, soit en capitulant, ont soutenu De Gaulle dans son premier travail anti-démocratique : écarter les formes politiques d'une véritable démocratie, que seule la lutte pour une Assemblée Constituante Souveraine aurait pu élaborer. Mais quand De Gaulle dirigeait son action anti-démocratique contre le peuple, ils ne l'ont pas vue, parce qu'ils étaient eux-mêmes associés à ce travail; parce que, comme De Gaulle, ils se sentaient menacés par les véritables aspirations démocratiques du peuple. AUSSI, LEUR ACTION AU GOUVERNEMENT DEPUIS LE DEPART DE DE GAULLE NE SE DISTINGUE-T-ELLE EN RIEN DE CELLE QU'IL Y MENAIT LUI-MEME.

C'est cela qui explique aussi que, devant l'action pétainiste actuelle de De Gaulle, le Gouvernement, tout en reconnaissant en paroles De Gaulle pour ce qu'il est, un candidat dictateur, dans la pratique, il collabore avec lui. En effet, réunis en Conseil des ministres restreint, spécialement pour décider de l'attitude à prendre, ces défenseurs de la démocratie, après de mûres réflexions, ont décidé de couper De Gaulle en deux... moralement, en distinguant "le premier résistant" de "l'homme politique". Mais comme "le premier résistant de France" a droit aux honneurs officiels, à l'utilisation de la radio, des chemins de fer, de tous les moyens étatiques qui sont d'habitude réservés uniquement aux représentants du Gouvernement, EN LA PERSONNE DU "PREMIER RESISTANT DE FRANCE", LES "DEMOCRATES" DU GOUVERNEMENT COLLABORENT AVEC LE CANDIDAT DICTATEUR, LE PETAIN N° 2.


La première étape de De Gaulle a été de faire échec aux aspirations de démocratie directe des travailleurs, d'écarter l'Assemblée Constituante Souveraine. Cependant, au moyen de manoeuvres parlementaires, à l'aide de bulletins de vote, on peut détourner le peuple de ses buts réels, mais cela ne suffit pas pour instaurer la dictature personnelle.

Strasbourg commence la deuxième étape : en effet, il ne s'agit pas là de discours et de propagande, mais de véritable mobilisation et de revue de forces groupées autour de De Gaulle. LE RYTHME DE SES DISCOURS, C'EST LE RYTHME DE LA MOBILISATION FASCISTE. Si les pseudo-démocrates, qui ont collaboré à la première étape, sont en fait les complices de la deuxième, en laissant tranquillement De Gaulle rassembler les forces nécessaires à l'étranglement de ce qui reste encore de libertés démocratiques, s'en remettre encore à eux, cela signifie que De Gaulle pourra, sans obstacle, passer à la troisième étape, qui est celle de L'ATTAQUE DIRECTE CONTRE LES ORGANISATIONS OUVRIERES, et de l'activité ouverte des bandes fascistes.

Le seul moyen d'étouffer dans l'oeuf le développement du mouvement fasciste, c'est d'organiser SUR PLACE des contre-manifestations. Si De Gaulle peut, comme à Strasbourg, continuer tranquillement à mobiliser ses troupes dans les villes de France, la troisième étape ne saurait tarder.

La chose la plus grave, c'est qu'à Strasbourg il n'y ait pas eu de contre-manifestation ouvrière.

Le P.C.F. qui, dans les colonnes de son journal, combat bruyamment De Gaulle, "l'aspirant dictateur", n'a entrepris aucune action de ce genre. Cependant, il est certain que même à défaut d'une contre-manifestation de rue, quand on n'est pas assez fort pour l'organiser ou que les conditions ne sont pas favorables, LA MOINDRE GREVE DE PROTESTATION DANS LES USINES peut faire voir à la masse de la population que la classe ouvrière n'est pas disposée à se laisser faire, et qu'en sa personne, elle peut mener la lutte contre le capitalisme et la dictature.


IL N'Y A PAS DE TREVE

Au moment où la C.G.T. a posé la revendication du minimum vital, dans de nombreuses usines, sous la pression des ouvriers, les patrons ont été obligés d'accorder des satisfactions partielles, des augmentations de quelques francs de l'heure, pour parer à un conflit ouvert.

Mais, malgré la pression exercée par la classe ouvrière, le patronat a pu sortir victorieux de cette lutte, grâce à l'appui du gouvernement et à l'adhésion des dirigeants syndicaux à ses considérations.

"Nous allons revoir la question au mois de juillet" a généreusement promis Ramadier. Cependant, depuis que par la capitulation de la C.G.T. la classe ouvrière a relâché sa pression, le patronat, lui, n'attend pas dans l'inaction "le mois de juillet". Non seulement il n'accorde plus d'augmentations partielles de salaires ; mais il essaie encore d'augmenter sa part de bénéfices en réduisant les salaires, par une révision des chronométrages, c'est-à-dire par la réduction des temps qui sont alloués à un ouvrier pour la fabrication d'une pièce.

Alors que chez Renault, par exemple, au moment où se posait la question du minimum vital, les dirigeants syndicaux affirmaient que, en attendant ce minimum vital, la direction patronale serait obligée d'accorder une augmentation minimum de 4 francs, que se passe-t-il aujourd'hui ? Depuis que les dirigeants cégétistes ont réussi à briser quelques mouvements grévistes isolés, on ne reparle plus des 4 francs ; bien plus, la direction qui a pu éviter l'offensive des ouvriers, poursuit son attaque en poussant le plus possible la cadence de travail, ce qui équivaut à une augmentation de ses bénéfices au détriment d'un effort non payé des ouvriers.

Tout ceci fait d'autant mieux ressortir la duperie des "primes à la production" que les actuels dirigeants syndicaux ont à nouveau mis en avant pour camoufler leur honteuse capitulation. Il faut avoir une bien mauvaise cause à défendre pour oser mettre en avant une pareille revendication, alors que depuis deux ans, malgré l'augmentation de la production, les salaires ont systématiquement baissé, bien que la plupart des usines appliquent déjà le fameux système des primes.

Nous faisons ici la même expérience que les ouvriers des autres pays capitalistes. En Amérique actuellement, alors que le pays n'a pas souffert des destructions de la guerre, la productivité est arrivée à un degré de développement extraordinaire. Mais les ouvriers américains ont vu leur pouvoir d'achat baisser à un tel point qu'ils sont obligés de soutenir une violente lutte gréviste pour défendre leurs salaires. Avant la guerre, le capitalisme japonais était arrivé à un développement considérable de la production. Son industrialisation lui permettait de battre, dans certaines branches, même la concurrence capitaliste américaine. Or, nous savons dans quel état de dénuement vivait l'ouvrier japonais.

L'augmentation de la production en régime capitaliste n'augmente pas automatiquement le niveau de vie des travailleurs. La conquête d'un meilleur niveau de vie pour les ouvriers est toujours le résultat de leurs luttes. Il en était de même avant la guerre : le niveau de vie plus élevé des ouvriers était le résultat de leur action, dans une situation où les capitalistes pouvaient leur faire des concessions.

On voudrait bien faire croire à l'ouvrier que ce sont les lois économiques compliquées qui règlent son salaire et son pouvoir d'achat, alors que la réalité confirme que c'est la résistance qu'il oppose au patronat qui en décide. Le salaire devient forcément une question de rapport de forces entre le patronat et les salariés dans une économie qui, comme l'économie capitaliste, n'est pas régie par des lois générales ayant en vue l'équilibre de la production, de la distribution, etc..., mais uniquement par le profit du capitaliste.

Et c'est ainsi que, sur la question du minimum vital, les ouvriers n'ayant pas attaqué et ne se défendant pas, le patronat passe, lui, à l'attaque, emporte des positions et continuera à en emporter, jusqu'à ce que les ouvriers contre-attaquent.

Si les travailleurs ne peuvent pas cesser la lutte, c'est parce que celle-ci leur est constamment imposée par le patronat : il faut vaincre pour ne pas être condamné à la misère la plus noire.

Ce fait impose aux ouvriers la tâche d'élargir leurs luttes, d'opposer aux attaques incessantes des capitalistes autre chose que des revendications limitées et partielles. Le minimum vital, c'était précisément cela, une revendication d'ensemble qui groupait tous les ouvriers pour arrêter l'attaque capitaliste contre leur niveau de vie. Et c'est pour cette raison que les dirigeants de la C.G.T., qui font semblant de compenser le minimum vital par les "primes à la production", n'ont pas, de cette façon, choisi un autre mode de défense pour les ouvriers, mais les ont au contraire livrés sans défense aux attaques patronales.


La renaissance du mouvement ouvrier allemand

SENS DES MANIFESTATIONS DE LA RUHR

L'extrême dénuement et la faim, dans une région où l'effort des ouvriers doit produire ce charbon tant sollicité de lui, ce sont là les raisons reconnues des "marches de la faim", des grèves de protestation, englobant des dizaines de milliers d'ouvriers, et de la grève générale des mineurs, qui ont eu lieu au début de ce mois dans la Ruhr. Le manque de logement, le manque de vivres, 750 calories de nourriture au lieu du minimum de 1.500 reconnu et alloué en principe, des localités qui restent des jours entiers sans pain, la gabegie et le marché noir organisé par l'occupant et les "collaborateurs" allemands, les capitalistes et les anciennes sphères dirigeantes, c'est cela, l'occupation un paradis pour les trafiquants, les capitalistes, les Etatsmajors, les "collaborateurs" ; un enfer pour le peuple travailleur. Pour le comprendre, il n'y a qu'à se rappeler la manière dont Hitler, qui devait punir, selon ses dires, les responsables de la guerre, s'est entendu avec tous les dirigeants et n'a puni, en vérité, que les classes travailleuses.

Les dirigeants allemands étouffent le peuple allemand sans aucun profit pour les peules des pays occupants, si ce n'est de les courber eux-mêmes pour cette occupation sous le joug du militarisme.

Le fait que les dirigeants des syndicats, malgré leur politique de "coopération" avec les alliés se sont mis à la tête des importants mouvements de masse dans la Ruhr, ce fait n'a pas empêché la propagande alliée d'insinuer que "l'agitation d'éléments nazis" est à l'origine de ces mouvements.

Les nazis peuvent utiliser le terrorisme comme moyen de susciter et d'entretenir le nationalisme ou l'esprit de revanche. Mais c'est une tromperie et une absurdité d'affirmer qu'ils pourraient s'appuyer sur un mouvement qui, de par son essence, est leur ennemi. Les nazis et les agents des capitalistes en général n'ont pas dans leurs méthodes d'organiser la grève générale, arme spécifiquement ouvrière, qui forge l'unité de la classe ouvrière et la dresse contre l'exploitation capitaliste. Contre le mouvement ouvrier, ils sont au contraire prêts à s'appuyer sur leurs ennemis d'hier, les occupants. Il suffit de se rappeler qu'au moment de la guerre, ils ont, pour se sauver de la vengeance populaire, ouvert le front du côté des Américains, qu'ils doivent aujourd'hui leur maintien à tous les postes étatiques, administratifs, municipaux, etc, que les ouvriers organisés en Allemagne ont déjà, à maintes reprises, manifesté contre la complicité des occupants, pour comprendre que les nazis voient aujourd'hui dans l'occupation alliée une garantie contre le mouvement ouvrier qu'ils ne sont plus eux-mêmes assez forts pour mater.

Ce n'est pas là le cas seulement de l'Allemagne. Au Japon, l'occupant américain n'a-t-il pas, de son côté, contre le mouvement gréviste japonais, tous ses "ennemis" d'hier, ministres dignitaires, officiers, capitalistes ? Dernièrement, en Corée, tandis que les autorités américaines faisaient à Saillant, représentant syndical allié, un accueil dont il s'est lui-même plaint, les ouvriers japonais, au contraire, l'ont reçu, en tant que représentant ouvrier, par une manifestation enthousiaste de plusieurs centaines de milliers de personnes, après laquelle Saillant a dû exprimer son admiration pour le mouvement syndical japonais.

Schumacher, dirigeant social-démocrate qui se donne pour représentant des ouvriers allemands a, en même temps que d'autres leaders, lancé des appels au calme, en expliquant aux ouvriers que "la faim rend incapable de penser sur le plan politique". Laisser aux bien nourris le soin de disposer du sort des affamés, voilà ce qui fait justement que ceux-ci restent des affamés.

Les manifestations des travailleurs allemands n'ont pas été seulement des "manifestations de la faim". Par la grève générale, forme de lutte supérieure et organisée, les ouvriers de la Ruhr ont renoué avec les traditions de lutte du prolétariat allemand, qui, après le prolétariat soviétique, était, par ses luttes, à partir de 1919, à la tête du mouvement ouvrier de toute l'Europe.

Par l'avènement du fascisme, la réaction capitaliste avait écrasé le mouvement ouvrier allemand et l'avait éliminé de la scène pour de longues années.

Par l'occupation militaire, le morcellement du territoire, leurs buts réactionnaires, en plongeant le pays dans la ruine et dans la prostration, les Alliés n'ont fait qu'aggraver la situation. Le sort du prolétariat allemand ou européen, un avenir de paix et de démocratie réelle, étaient bien les derniers des soucis de ces maîtres absolus du pays. Derrière leurs phrases de paix et de démocratie, ils ont caché leurs rivalités réelles, cherchant chacun à utiliser l'Allemagne comme un point d'appui contre ses rivaux. Mais tandis que, par leurs rivalités, ils travaillent ainsi chacun pour mettre l'Allemagne dans le jeu, ces rivalités et les contradictions impérialistes donnent aussi au mouvement ouvrier la possibilité de renaître. Car si les Alliés n'étaient pas obligés d'essayer de se concilier telle ou telle partie de l'Allemagne contre leurs adversaires, ils auraient, comme Hitler, utilisé sans hésitation la mitraille contre les mouvements ouvriers.

Mais le mouvement ouvrier allemand renaît non seulement dans le cadre de ces rivalités, mais aussi grâce au déferlement des luttes ouvrières dans tous les pays.

Partout, le mouvement reprend ; malgré toutes les défaites passées et les coups portés par la guerre, les contradictions internes du capitalisme recréent constamment des conditions de lutte favorables. Dans la renaissance du mouvement ouvrier allemand se reconstitue un des chaînons indispensables à la chaîne de la lutte ouvrière dans le monde.

Si la classe ouvrière allemande renoue avec ses traditions, le prolétariat français a, lui aussi, des traditions à reprendre, que les renégats de la classe ouvrière s'efforcent de lui faire oublier. Ce sont celles de la solidarité ouvrière, des manifestations et des luttes qu'il a soutenues en 1923 pour l'évacuation de la Ruhr, dirigées par le Parti qui ne s'intitulait pas encore Parti Communiste Français --au service des capitalistes-mais tout simplement Parti Communiste (section française de la Illème Internationale) au service des travailleurs.

Aujourd'hui, il n'y a pas de meilleur écho à renvoyer à l'effort de lutte ouvrière du prolétariat voisin que de s'opposer à l'action impérialiste de notre propre bourgeoisie, et d'exiger la cessation de l'occupation, source de misère et fardeau écrasant pour les deux peuples.


POURQUOI L'ANGLETERRE ACCORDE-T-ELLE
L'INDEPENDANCE AUX INDES ?

L'Angleterre annonce son intention de quitter les Indes en 1948. Quelles forces ont pu obliger le "Royaume Uni" à renoncer - même pour 1948 - au "joyau de la couronne" britannique ? Ce n'est pas que l'Angleterre renonce à conserver les Indes, mais c'est qu'elle n'a plus les forces suffisantes pour s'y maintenir à l'ancienne manière, par l'occupation et la loi martiale.

En effet, pendant que la métropole se ruinait dans la guerre, la bourgeoisie hindoue s'enrichissait, concentrait entre ses mains la plus grande partie des richesses du pays et prêtait à son maître. Si l'Angleterre refusait de reconnaître ce nouveau rapport de forces en faveur de la bourgeoisie hindoue, la série d'incidents sanglants dus à l'occupation ne serait jamais close.

Mais que signifierait, pour les capitalistes anglais, la perpétuation de cet état d'insurrection latente ? Le Monde (28-3-47) nous apprend qu'en Indonésie, "depuis des mois, un intense trafic clandestin... s'effectuait entre Sumatra et Bornéo d'une part, et Singapour d'autre part. Plus de 300 millions de dollars auraient ainsi été, pour la seule année 1946, illégalement exportés des Indes. Ce trafic, profitable aussi bien aux nationalistes qu'aux commerçants anglais, américains et chinois, avait pour effet de frustrer les Hollandais d'importantes quantités de devises étrangères." Et voilà la source de l'esprit "conciliateur" de la Hollande et de son acceptation de l'indépendance indonésienne.

Mais tous les impérialistes sont logés à la même enseigne. Voilà pourquoi l'Angleterre cherche à "couper la poire en deux" avec la bourgeoisie nationaliste hindoue. "Nehru est désigné pour jouer le rôle d'un Smuts hindou", écrit le Socialist Appeal de mars 1947. Nouvelle Afrique du Sud, l'Inde obtiendrait son indépendance dans le cadre du Commonwealth - la liberté des couches supérieures de la société hindoue dans le cadre de la servitude des masses.

Mais "l'indépendance" accordée par l'Angleterre démasque le véritable visage de la bourgeoisie nationaliste. De quel côté elle se trouve en réalité, la grève générale de Calcutta (5 février) le dévoile : les Syndicats du Bengale donnèrent l'ordre de grève, malgré l'opposition des organisations nationalistes qui craignaient "des troubles". Le succès de la grève montre la force et l'indépendance du mouvement ouvrier aux Indes.

C'est cette force et cette indépendance qui obligent la bourgeoisie hindoue à renoncer aux phrases révolutionnaires et à chercher un accord avec son ennemi d'hier, l'impérialisme, dont le "savoir-faire" et les bâtons lui font besoin. Ainsi, sous la pression des masses, la Conférence asiatique qui vient de se tenir aux Indes avait décidé l'aide au Vietnam. Mais le "révolutionnaire" nationaliste Nehru précise : le moment n'est pas venu de la réalisation pratique de cette décision !

Mais les manoeuvres peuvent retarder et non empêcher l'intervention des masses, qui sera d'autant plus violente et sanglante qu'elle aura été plus retardée. La fin de l'occupation anglaise aux Indes sonne le glas de la bourgeoisie hindoue. Celle-ci en est consciente.

Voilà pourquoi un haut fonctionnaire de la Chambre des Princes a déclaré : "La possibilité d'une alliance militaire entre certains Etats indiens ou groupes d'Etats et le Gouvernement britannique ne peut pas être exclue entièrement." (Le Monde, 114). Mais à la solidarité à éclipse qui unit l'impérialisme anglais et la bourgeoisie hindoue, s'oppose la solidarité de fait surgie de la lutte menée, sur tous les points du globe, par le mouvement ouvrier et les peuples occupés.


ERRATUM

 

De regrettables coquilles s'étant glissées dans le texte de l'article [*] "La Lutte contre le fascisme" du nº87, nous résumons l'idée fondamentale contenue dans l'article et nous espérons que nos lecteurs pourront ainsi en reconstituer le véritable sens.

Le but de l'article, c'était de démontrer que, soit pour se défendre efficacement contre les attaques fascistes en vue, soit pour prendre l'offensive pour imposer aux capitalistes, comme en juin 36 le relâchement de leur pression économique, la classe ouvrière doit recourir à la grève générale. Mais étant donné les forces des camps en lutte ainsi que l'histoire de ces dernières années depuis 1938 (essai de la bourgeoisie de mater par la force la classe ouvrière), une grève générale ne peut plus être menée avec succès sans l'armement des travailleurs, et par conséquent sans la constitution de Comités d'usine et de quartier, et sur cette base d'un Gouvernement ouvrier et paysan élu démocratiquement par les Comités parmi les tendances politiques prolétariennes de leur choix.


[*] L'article objet de cet erratum a été rectifié.


UNE GREFFE STERILE

L'Humanité du ter avril, dans le compte rendu des "Assises de la baisse des prix", rappelle (?) aux Comités d'entreprises qu'ils ne doivent pas être des "organismes de collaboration au service du patronat" et qu'ils ne doivent pas borner leur activité au domaine des oeuvres sociales.

Mais on peut aller plus loin, et se demander pourquoi les choses en sont là, pourquoi les Comités se confinent à l'administration des oeuvres sociales et autres. L'Humanité elle-même nous permet de le comprendre : dans sa critique du discours de De Gaulle, elle montre que celui-ci préconise les Comités tripartites (groupant des représentants patronaux, des cadres et des ouvriers) identiques à ceux de la Charte de Pétain ; mais L'Humanité oublie de dire que les Comités actuels ont précisément ce caractère. C'est pourquoi ils sont marqués du sceau de l'impuissance dans tous les domaines qui touchent aux intérêts vitaux des travailleurs, et c'est pourquoi ce sont des "organismes de collaboration au service du patronat", organismes qui le déchargent des petits ennuis des "oeuvres sociales" ou des rapports avec le personnel.

Les rédacteurs de L'Humanité sont-ils bornés au point de ne pas tirer eux-mêmes les conclusions qui s'imposent à la lecture régulière de leur propre journal ? Sûrement pas, car leur intention véritable est non pas de morigéner les Comités d'entreprises et de les orienter dans une voie nouvelle, mais de faire croire aux ouvriers que ces organismes pourraient faire autre chose que collaborer avec le patron. Parce que les chefs staliniens se rendent comptent que la classe ouvrière ressent de plus en plus la nécessité de la lutte contre les responsables directs de la misère, les gros capitalistes et l'Etat qui les protège ; car ce ne sont pas les petits abus, mais les prix de base, la grosse industrie, qui font la vie chère.

Voilà pourquoi les bureaucrates staliniens font dans le même article quelques concessions verbales et parlent de lutte de classe ; ils préfèrent prendre les devants pour en parler de la façon la moins dangereuse pour les intérêts capitalistes, et les leurs : en greffant tant bien que mal la lutte de classe sur le dos des Comités d'entreprise qui n'en peuvent, en parlant du "rôle qu'ils ont à jouer dans la lutte pour une baisse réelle du coût de la vie".

Or, ils siègent au Gouvernement qui, lui, fixe les prix, fait ou ne fait pas appliquer une baisse dérisoire et autorise même l'augmentation des prix des principaux produits (sidérurgie), sous prétexte que les marges bénéficiaires de ces pauvres capitalistes sont insuffisantes.

Et ils voudraient nous faire croire que, volant audevant des aspirations des masses, ils se préparent à mener la lutte pour faire baisser les prix sur le terrain local, où ils ont déjà abandonné, dès qu'ils en ont eu l'occasion, la lutte pour les salaires, pour... respecter la loi qui les bloque. Mais la lutte pour la baisse des prix devrait non seulement passer par-dessus la loi qui fixe ceux-ci, mais encore se heurter à la législation bourgeoise tout entière : pour obliger le patron à baisser les prix, il faudrait le soumettre à un contrôle rigoureux, vérifier sa comptabilité, ses achats, ses dépenses, ses stocks, en un mot violer la propriété privée... et la loi.

Encore une fois, cette lutte de classe serait avant tout dirigée contre l'Etat bourgeois et son Gouvernement.

Il faudrait être sourd ou aveugle pour oser croire que les gens qui, au Gouvernement, serrent les mains des ministres bourgeois et votent les lois qui défendent les capitalistes, pourraient, sur le terrain de l'usine, mener la lutte pour saper la domination exclusive de ces mêmes capitalistes. La lutte de classe est une et indivisible. On ne peut être à la fois l'ami intime et l'ennemi juré d'un même homme, on ne peut pas lutter contre le Gouvernement du dehors et y collaborer à l'intérieur, on ne peut pas organiser la lutte de classe à l'usine en l'excluant sur le plan gouvernemental - car la collaboration gouvernementale, c'est la généralisation et la consécration de l'abandon de la lutte de classe sur tous les terrains.

HARDY.


"MARCHE NOIR" ET POUVOIR D'ACHAT

La dernière campagne sucrière ayant été très bonne, toutes les rations de sucre avaient été relevées depuis quelques mois. Mais, voici que, sans donner d'explications, le Gouvernement décide de ramener ces rations à leur ancien taux.

Pourquoi cette réduction ?

L'Humanité nous explique que le tonnage de sucre actuellement disponible pour la consommation domestique est supérieur à la consommation de 1938. Ce journal prétend que cette mesure n'a pour but que de favoriser le marché noir, la vente à 300 francs le kilo. Le Peuple, de son côté, rapporte comment ce marché noir se fait avec la "complicité consciente, méthodique et supérieurement organisée du grand patronat". C'est ainsi que 13.000 tonnes de sucre ont été récemment écoulées au marché noir par de gros industriels sucriers...

Pendant les années de la guerre, il était communément admis que le "marché noir" était le fruit de la raréfaction des produits. Et chacun espérait qu'avec le retour de l'abondance, tout rentrerait dans l'ordre.

Mais aujourd'hui, que voyons-nous ?

Pour le sucre, les quantités offertes sur le marché parallèle à 300 francs le kilo sont de loin supérieures à celles mises à la disposition de la population, grâce au rationnement. Et comment expliquer ces prix de "noir" pour une denrée existant en quantité suffisante pour couvrir les besoins de toute la population ? Comment expliquer que de tels prix, s'ils étaient surfaits, puissent se maintenir, puisqu'il est certain que les stocks existants ne sont pas écoulés ?

L'exemple de la viande nous apporte cette explication. Aujourd'hui, il est clair pour tout le monde que le rationnement de cette denrée n'est pas motivé par la pénurie, mais par une question de prix. Les spéculations des grossistes et des chevillards mises à part, il est certain que même les producteurs se refusent à livrer le bétail aux prix correspondant à la taxe, ces prix ne couvrant pas leurs frais de production. Et pourquoi le Gouvernement s'obstine-t-il à vouloir faire livrer ces produits au-dessous de leur valeur ? Le Monde nous en donne l'explication à propos du blé : "En fait, dans l'établissement de certains prix, on fait intervenir, à côté des considérations d'ordre économique, des considérations d'ordre social : on s'est efforcé, pour des raisons évidentes, "de maintenir le niveau général des prix au-dessous de celui qu'eut déterminé la libre confrontation de la demande et de l'offre, et certains prix considérés comme particulièrement symboliques (!), le blé, le lait, ont été maintenus à un niveau particulièrement bas".

Autrement dit, si on laissait les prix des denrées essentielles telles que le blé et la viande s'établir "spontanément" à leur niveau réel, ces denrées deviendraient inaccessibles aux masses laborieuses. Dans l'intérêt du gros patronat, pour pouvoir imposer aux ouvriers leurs bas salaires, le Gouvernement cherche à maintenir artificiellement certains prix à un niveau très bas. Mais il lui est chaque jour plus difficile de le faire, taxation et réglementation lésant les intérêts d'autres catégories de capitalistes qui se défendent en refusant de livrer les produits sur le marché. C'est pourquoi ils ont été obligés de réduire la ration de sucre, c'est pourquoi ils cherchent depuis des mois une solution pour la viande sans la trouver.

Cette politique appliquée au blé nous mène droit à une disette réelle pour les années à venir. Il est plus facile au paysan d'écouler à un prix "rémunérateur" la viande et les oeufs que le blé qui est collecté officiellement et payé au prix de la taxe par les caisses de crédit agricole. C'est pourquoi les paysans cessent de cultiver le blé et produisent des céréales secondaires pour nourrir leur bétail.

Pour les textiles, malgré la réapparition des produits en quantité suffisante, les prix officiels se sont établis loin au-dessus du pouvoir d'achat des classes pauvres. Cest pourquoi, dans ce domaine, le rationnement s'est avéré inutile sans que les pouvoirs publics aient eu à intervenir. La grande majorité de la population ne se sert pas des points qui lui sont alloués et continue à porter ses guenilles, tandis qu'une minorité disposant du pouvoir d'achat suffisant se procure ce dont elle a besoin en dehors des attributions officielles. Dans ce domaine, le "rationnement par les prix" --la nouvelle expérience que le Gouvernement va tenter pour la viande-- s'est établi spontanément en rapport avec le pouvoir d'achat des diverses couches de la population.

Quant au tabac --denrée secondaire-- c'est le Gouvernement lui-même qui organise le double secteur : prix taxés et prix "libres". Que les ouvriers se contentent de la ration à prix réduit qu'on veut bien leur octroyer et laissent les heureux de ce monde fumer en paix ! La même opération a été décidée en ce qui concerne l'essence, l'Etat ne pouvant tolérer que les sommes énormes encaissées par les trafiquants "particuliers" échappent à ses caisses, alors qu'elles lui reviennent normalement en vertu du monopole qu'il s'est octroyé sur ces produits.

LUCIENNE


POUR HATER L'UNITE REVOLUTIONNAIRE

La Vérité du 4-4 a publié une note du B.P. du P.C.I. signalant que la mise en garde parue dans le N°154 de ce journal "n'était nullement destinée à attaquer politiquement l'"Union Communiste", encore moins à jeter le discrédit sur ses militants. Elle avait seulement pour but de dissiper toute équivoque sur l'appartenance de ce groupe à la IVème Internationale et de préciser que sa politique ne pouvait en aucune façon engager le P.C.I. Le B.P. du P.C.I. a regretté qu'un malentendu ait pu se produire sur l'interprétation de cette note". Rappelons que le placard en question disait textuellement : "Nous mettons en garde tous nos camarades contre la confusion VOLONTAIREMENT créée par ce groupe..." (souligné par nous).

Le B.P. affirme d'autre part que "malgré ces précisions... la délégation de l'"Union Communiste" n'a pas cru devoir apporter une réponse positive et constructive aux suggestions du P.C.I.".

La Lutte de Classes avait depuis fort longtemps fait, elle aussi, des propositions en vue de la réalisation de l'unité révolutionnaire (voir Lutte de Classes. n°53). La réponse que nous avons reçue à l'époque, "Les poissons pilotes", est une preuve suffisante que les conceptions du P.C.I. et les nôtres, sur la construction du parti révolutionnaire, étaient loin de se rapprocher (l'expérience a prouvé qu'une référence abstraite au même programme n'implique pas la même pratique et politique).

Cependant si, en l'absence de conceptions communes vérifiées par la pratique, une séparation organisationnelle est préférable à une unité de pure forme, il reste néanmoins que l'existence indépendante, justifiée ou non, de multiples petites organisations qui veulent toutes la révolution prolétarienne, est le signe infaillible de la faiblesse du mouvement ouvrier ; et si, en dernier lieu, l'unification révolutionnaire n'est possible que sur la base de la croissance du mouvement ouvrier dans son ensemble et de l'activité consciente de la classe ouvrière, on peut faire un grand pas en avant dans cette direction par le maximum d'unification du travail des révolutionnaires en direction de la classe ouvrière. Par conséquent, nous sommes prêts, au moyen d'un bulletin intérieur commun, à vérifier jusqu'à quel point il s'est créé ou peuvent se créer, parmi les militants révolutionnaires, des conceptions communes organisationnelles et politiques de travail.


...ECHOS...


RENAULT


Sur un prétendu Comité de lutte

Les travailleurs de chez Renault auraient été bien étonnés d'apprendre, en lisant La Vérité du 4-4-47, qu'il existerait dans l'usine un Comité de lutte, né de la nécessité "de passer par-dessus la tête des organisations traditionnelles et de leurs représentants".

En dehors des publications de la C.G.T. et du P.C.F., diverses tendances se manifestent dans l'usine.

Dans certains secteurs, les ouvriers voient circuler des tracts du M.F.A., dans d'autres, ceux de la C.N.T., ailleurs circule un bulletin, La Voix des Travailleurs de chez Renault.

Dans plusieurs mouvements de grève, se sont manifestés des ouvriers combatifs, connus pour appartenir à ces tendances ou étant isolés, quant à la soi-disant activité du Comité de lutte, les travailleurs de chez Renault n'en connaissent pas l'existence et pour cause.

Là où une activité quelconque s'est manifestée, soit par la circulation de tracts ou de journaux, soit par l'intervention de camarades combatifs, dans bien des cas les ouvriers l'ont appuyée de leur sympathie, mettant bien souvent en difficulté les bonzes de la C.G.T. ou du P.C.F.

Malheureusement, les ouvriers sont loin d'être passés à la lutte ouverte pour la défense de leurs revendications et là où des mouvements isolés ont eu lieu, malgré l'activité de certains éléments combatifs, le plus souvent ils ont laissé canaliser leur mouvement par les bureaucrates cégétistes. Si les ouvriers ont donné leur appui à diverses actions dans certains cas précis tels que : signature de pétition de protestation contre la mauvaise répartition de la prime ou pour la revendication des 10 francs, diffusion de tracts, etc..., ils ne sont pas encore arrivés à se donner la nouvelle forme d'organisation que sont les Comités de lutte.

Et dans bien des cas, ce sont encore les organisations officielles, malgré la désapprobation des travailleurs envers leur mauvaise politique, que ceux-ci utilisent pour leur lutte quotidienne. C'est au délégué cégétiste qu'ils s'adressent quand ils ont un litige à régler avec la direction ; bien souvent également ils se laissent prendre aux combines et aux "tactiques" des bureaucrates qui leur font signer des pétitions pour le charbon de la Ruhr ou qui organisent des souscriptions pour une couronne à Jean-Richard Bloch.

Par ailleurs, depuis des mois, des ouvriers avancés ont commencé à se réunir pour discuter des problèmes de l'usine.

C'est une telle réunion, à laquelle il a participé par le hasard des liaisons, que le correspondant de La Vérité a pris pour un "Comité de lutte". Transformer cette prise de contact entre éléments avancés de l'usine en un "Comité de lutte", cela contient autant de vérité que l'information donnée par un tract du même journal pendant la grève des rotativistes, affirmant que "chez Renault, dans plusieurs départements de l'usine.... les ouvriers réussissent à décrocher les 10 fr. supplémentaires de l'heure", quand ceux-ci ont seulement débrayé pour des augmentations de salaires qu'ils n'ont pas eues. C'est ce qu'on appelle prendre ses désirs pour des réalités.

PIERRE


Le journal de la section syndicale, L'Unité, nous "apprend que la section syndicale a protesté contre le fait qu'aux "automotrices" on ne fait plus que 96 heures par quinzaine au lieu de 108".

Voilà comment la C.G.T. défend la journée de travail. Comme disait un ouvrier : "Et dire que je suis allé en prison pour défendre les 40 heures !"

C'est encore L'Unité qui rappelle à l'ordre des ouvriers qui se sont "harponnés" avec des gardiens :

"Dans toute société, il faut une certaine compréhension de l'ordre librement consenti, pareil à une équipe sportive qui se soumet, dans l'intérêt général, aux décisions de son capitaine ou de son arbitre."

Ces messieurs de L'Unité comparent les ouvriers de la Régie à des sportifs. Pour du sport, c'est du sport. Mais l'argument suprême vient à la fin de l'article : "Surtout, sachez, camarades, que 90% des gardiens sont syndiqués".

Réflexion d'un ouvrier : "On a compris, ils payent leurs timbres, ces sont des clients sérieux".


A L'IMPRIMERIE NATIONALE

Au sujet de notre écho concernant le manque de solidarité des ouvriers et du syndicat de l'Imprimerie Nationale vis-à-vis des grévistes de chez Lang, nous apprenons qu'en fin de compte les délégués ont décidé d'imposer un impôt de grève de deux heures de travail à tout le personnel en faveur de ces grévistes.

Certains ouvriers ont refusé de participer à ce geste de solidarité. Les ouvriers du rang, membres d'une commandite, n'ont pas hésité, eux, à exclure trois de ces ouvriers de leur groupe, prouvant ainsi qu'ils savaient mettre les intérêts de solidarité de leur classe au-dessus de leur intérêt particulier immédiat. Mais les dirigeants syndicaux, trop soucieux de conserver des cotisants, se sont gardés de prendre la moindre sanction contre ces récalcitrants.


COEFFICIENTS DE VIE CHERE
Base 100 en 1939

Prix des grossistes (Prix officiels)

 

23 produits alimentaires

Décembre 1946

946

Janvier 1947

878

Février 1947

1.007

112 produits industriels

Décembre 1946

739

Janvier 1947

756

Février 1947

757

Indice général

Décembre 1946

842

Janvier 1947

867

Février 1947

882


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