1935 |
La position de l'Ecole Emancipée lors de la réunification syndicale de 1935.... |
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Déclaration de la Fédération Générale de l'Enseignement au congrès de la fédération C.G.T.
23 septembre 1935
Camarades,
C'est avec un réel plaisir que la Fédération Unitaire de l'Enseignement vient dans votre Congrès apporter le salut fraternel de notre organisation.
Nous sommes heureux de remercier la délégation présidée par le camarade Mérat, avec laquelle nous nous sommes rencontrés le vendredi 20 septembre et qui a bien voulu satisfaire à notre désir de vous apporter directement le point de vue de notre Fédération sur la question si importante de l'Unité.
Nous tenons à rappeler que, profondément unitaires, nous avons été les premiers à préconiser, au sein de notre Centrale, le Congrès global de fusion et l'Unité sans vainqueurs ni vaincus. Partisans résolus du regroupement des forces prolétariennes, nous avons toujours œuvré sincèrement pour que l'unité d'action, prélude nécessaire - à notre avis - de l'Unité organique, se réalise face aux attaques de la bourgeoisie.
Déjà, en 1931, notre délégué au Congrès de la C.G.T.U. défendait le Congrès global de fusion: aujourd'hui, nous vous déclarons nettement que nous restons fidèles à cette conception de la réalisation de l'unité, conception en dehors en dehors de laquelle nous ne saurions envisager la seule unité corporative.
C'est dans cet esprit que la Fédération Unitaire de l'Enseignement a établit les propositions pratiques de fusion que je vais vous exposer.
Pour nous, la question qui doit venir en premier lieu est celle de la structure fédérale.
Les militants ici présents connaissent sans doute la structure de la F.U. de l'E.:
La Fédération Unitaire de l'Enseignement est composée de syndicats départementaux. A chaque syndicat, adhèrent directement toutes les catégories du personnel enseignant: instituteurs et institutrices titulaires, normaliens et normaliennes, auxiliaires, professeurs des 1°, 2°, 3° degré, commis d'inspection, économes, répétiteurs, maîtres d'internat, etc., etc... Les membres de ces diverses catégories peuvent se grouper en commissions spéciales, localement et nationalement, pour l'étude de leurs revendications particulières. II peut même se constituer dans nos syndicats des groupes de jeunes, de retraités, ou des groupes féministes qui restent des groupes d'étude.
Enfin, un seul congrès de tous nos syndicats se réunit annuellement. A ce congrès peuvent assister et participer aux débats les syndiqués de toutes catégories délégués ou non délégués.
Si nous avons une structure si différente de la vôtre, c'est parce que, à notre avis, elle présente de sérieux avantages que je regrette de ne pouvoir développer longuement ici, mais que je veux simplement vous résumer.
D'abord, elle permet de combattre efficacement l'esprit de catégorie et de fortifier l'esprit de solidarité, de camaraderie, des membres d'une même famille : celle de l'Enseignement.
Elle réduit au minimum la bureaucratie syndicale en simplifiant les tâches, chose importante dans l'engagement et le développement des luttes en perspective.
Enfin, et surtout, elle permet d'opposer à la concentration grandissante de l'économie capitaliste et du pouvoir politique de la bourgeoisie, la concentration indispensable des forces ouvrières en général et du personnel enseignant en particulier.
Nous savons tous qu'il existe des revendications communes à tout le personnel, que ce sont même les plus importantes à l'heure actuelle et qu'il importe donc pour les mettre en relief et les taire triompher d'éviter l'éparpillement des forces au moment de l'action.
La F.U. voudrait voir cette structure adoptée au moment de la fusion, non pour une question d'amour-propre, mais parce qu'elle est certaine que cette structure est mieux adaptée aux nécessités de l'heure.
Une autre question sur laquelle la F.U. tient à s'expliquer clairement, c'est la question des minorités et de la majorité.
II est, en effet, certain que du congrès de fusion, ne peut sortir une unanimité tant sur les principes que sur l'orientation du syndicalisme.
Aussi, il nous parait indispensable de préciser les droits et les devoirs de la majorité, et de la ou des minorités qui peuvent s'affirmer.
II est certain qu'après une discussion claire, large : qu'après que les assemblées régulières (A.G. ou Congrès) se sont librement prononcées, il est du devoir des minorités de se soumettre à la discipline dans l'action.
Il est non moins certain que pour permettre aux minorités de discuter de toutes les questions et surtout les moyens d'action, des droits doivent leur être reconnus, nous voulons parler de la liberté d'opinion qui implique nécessairement la liberté d'expression, laquelle implique à son tour le droit de se grouper par affinités et de propager le point de vue minoritaire.
C'est ainsi que dans la Fédération Unitaire de l'Enseignement, trois tendances syndicalistes, je ne dis pas politiques, peuvent en toute liberté exprimer leur point de vue dans les A.G. [1], dans les Congrès, dans la Presse.
Nous assurons même à nos minorités, en contrepartie du devoir de discipline, le droit de contrôle sur la majorité par la représentation proportionnelle, non dans les organismes de direction où nous savons que l'homogénéité est indispensable, mais dans les organismes de contrôle : conseils syndicaux et conseil fédéral.
J'en arrive au processus de la fusion de l'Enseignement, fusion qui, je le déclare à nouveau, reste subordonnée à la réalisation de l'unité confédérale.
Notre Congrès d'Angers s'est prononcé pour la constitution de commissions paritaires à l'échelle syndicale et à l'échelle fédérale, chargées de régler le détail de la fusion.
Déjà, le Congrès du S.N. s'est montré favorable à une commission interfédérale. Le camarade Mérat et votre bureau la défendront certainement devant ce Congrès. Nous vous demandons également - pour les mêmes raisons - d'adopter le principe des commissions mixtes à l'échelle syndicale. L'unité syndicale est en bonne voie de réalisation, nous nous en félicitons. Nous savons qu'une période transitoire, relativement longue, va s'écouler de votre congrès au congrès de fusion. L'heure est grave. Le gouvernement de la bourgeoisie va porter de nouvelles atteintes particulièrement odieuses contre nos conditions d'existence. Le droit syndical est plus que jamais menacé. Les maigres libertés démocratiques acquises au cours de nombreuses années de lutte disparaissent, la guerre est là. Les bandes armées du fascisme préparent dans l'ombre le coup de force qui les porterait au pouvoir.
Les nécessités de la lutte contre les décrets-lois de spoliation, contre la politique de classe du gouvernement Laval-Herriot, contre la répression nationale et internationale, contre le fascisme et les menaces de guerre, réclament de notre part une vigilance de tous les instants et une contre-offensive immédiate et puissante.
Camarades, la situation exige donc que chaque organisation prenne ses responsabilités. Vous ne pouvez vous refuser à réaliser avec nous l'unité de direction, laquelle est, nous le répétons, la préface de l'unité syndicale.
D'autres groupements confédérés, vous ne l'ignorez pas, ont déjà pris cette responsabilité.
Au terme de cette déclaration, nous formulons simplement ce souhait : que votre congrès accepte les modalités de fusion telles que nous venons de les exposer, qu'il accepte aussi cette action commune immédiate, seule susceptible de tenir en échec le gouvernement. Et alors, notre vieille Fédération de l'Enseignement ;
Celle de 1907 ;
Celle de Chambéry ;
Celle qui, de 1914 à 1918, au prix des plus durs sacrifices, pratiqua seule en France l'internationalisme prolétarien ;
Celle qui, depuis trente années, lutte sans faiblir contre la répression gouvernementale ;
Se réjouira d'entrer avec son expérience des luttes sociales dans la Fédération Unique de demain, qu'elle animera de sa conviction et de sa foi révolutionnaires ;
Fédération Unique qui apportera à la classe ouvrière sa contribution à cette double tâche :
Notes
[1] A.G. : les Assemblées Générales.
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