1875 |
Une lettre d'Engels qui complète et précise son appréciation et celle de Marx sur le programme de Gotha et la fusion entre marxistes et lassalliens. |
Lettre à A. Bebel
18 mars 1875
Londres, 18-28 mars 1875.
Mon cher Bebel,
J'ai reçu votre lettre du 23 février, et je me réjouis de savoir que vous êtes en si bonne santé.
Vous me demandez ce que nous pensons de toute cette histoire de fusion. Malheureusement, il en est de nous absolument comme de vous. Ni Liebknecht, ni qui que ce soit ne nous a fait parvenir la moindre communication, et nous ne savons donc, nous aussi, que ce que nous apprennent les journaux. Or, ces journaux ne contenaient rien à ce sujet jusqu'à la semaine dernière, où ils publièrent le projet de programme. Vous pensez si ce projet nous a étonnés.
Notre parti avait si souvent tendu la main aux lassalliens pour faire la paix ou tout au moins pour former un cartel, il avait été repoussé si souvent et de façon si cassante par les Hasenclever [1], les Hasselmann [2] et les Tölke [3] que même un enfant aurait pu en conclure que si ces messieurs viennent aujourd'hui eux-mêmes nous offrir la réconciliation, c'est qu'ils sont dans une sacrée impasse. Étant donné le caractère bien connu de ces gens, c'est notre devoir de tirer profit de l'impasse où ils se trouvent, pour exiger toutes les garanties possibles, afin que ce ne soit pas aux dépens de notre Parti qu'ils raffermissent leur position ébranlée dans l'opinion des masses ouvrières. Il fallait les accueillir de la façon la plus froide, leur témoigner la plus grande méfiance, et faire dépendre la fusion des dispositions qu'ils montreront à abandonner leurs mots d'ordre sectaires ainsi que leur aide demandée à l'État et à accepter, dans ses points essentiels, le programme d'Eisenach de 1869 ou une nouvelle édition de celui-ci améliorée et conforme aux circonstances présentes. Du point de vue théorique, c'est-à-dire ce qu'il y a de décisif pour le programme, notre Parti n'a absolument rien à apprendre des lassalliens, alors que c'est l'inverse pour les lassalliens. La première condition de la fusion serait qu'ils cessassent d'être des sectaires, c'est-à-dire des lassalliens; en d'autres termes, que leur panacée, à savoir l'aide de l'État, fût sinon abandonnée tout à fait par eux, du moins reconnue comme mesure transitoire et secondaire, comme une possibilité parmi beaucoup d'autres. Le projet de programme prouve que si nos gens sont théoriquement très supérieurs aux leaders lassalliens, ils leur sont bien inférieurs en fait de roublardise politique. Les « honnêtes » (Ehrlichen [4]) ont de nouveau réussi à se faire cruellement rouler par les « malhonnêtes [5] ». On commence, dans ce programme, par accepter la phrase suivante de Lassalle qui, bien que ronflante, est historiquement fausse : « Vis-à-vis de la classe ouvrière, toutes les autres classes ne forment qu'une seule masse réactionnaire ». Cette phrase n'est vraie que dans quelques cas exceptionnels, par exemple dans une révolution du prolétariat comme la Commune, ou dans un pays où ce n'est pas la bourgeoisie seule qui a modelé l'État et la société à son image, mais où, après elle, la petite bourgeoisie démocratique a achevé cette transformation jusque dans ses dernières conséquences [6]. Si en Allemagne, par exemple, la petite bourgeoisie démocratique appartenait à cette masse réactionnaire, comment le Parti ouvrier social-démocrate aurait-il pu pendant des années marcher la main dans la main avec elle, avec le Parti populaire (Volkspartei) ? Comment le Volksstaat aurait-il pu tirer toute la substance de son programme politique de l'organe de la petite bourgeoisie démocratique, la Frankfurter Zeitung [7] ? Et comment se fait-il qu'au moins sept des revendications de ce même programme se retrouvent absolument mot à mot dans les programmes du Parti populaire et de la démocratie petite-bourgeoise ? J'entends les sept revendications politiques numérotées de 1 à 5 et de 1 à 2, dont il n'est pas une qui ne soit bourgeoise-démocrate.
Deuxièmement, le principe de l'internationalisme du mouvement ouvrier est, dans la pratique, complètement abandonné pour le présent, et cela par des gens qui, cinq ans durant et dans les circonstances les plus difficiles, ont défendu hautement ce principe de la façon la plus digne d'éloges. Le fait que les ouvriers allemands sont aujourd'hui à la tête du mouvement européen repose avant tout sur l'attitude vraiment internationale qu'ils ont eue pendant la guerre [8]; il n'y a pas d'autre prolétariat qui se serait aussi bien conduit. Et c'est aujourd'hui, où partout à l'étranger les ouvriers affirment ce principe avec la même vigueur et où les gouvernements font tous leurs efforts pour l'empêcher de se manifester dans une organisation, qu'ils devraient l'abandonner ? Que reste-t-il dans tout cela de l'internationalisme du mouvement ouvrier ? La faible perspective non pas d'une coopération future des ouvriers d'Europe en vue de leur affranchissement, mais d'une future « fraternisation internationale des peuples », des « États-Unis d'Europe » des bourgeois de la Ligue pour la paix !
Il n'était évidemment pas nécessaire de parler de l'internationale comme telle. Mais au moins, ne fallait-il pas marquer un recul sur le programme de 1869, et on pouvait dire par exemple bien que le Parti ouvrier allemand soit obligé d'agir pour l'instant dans les limites des frontières existantes de l'État (le Parti ouvrier allemand n'a pas le droit de parler au nom du prolétariat européen, et encore moins d'avancer des choses fausses), il reste conscient des liens de solidarité qui l'unissent aux ouvriers de tous les pays et sera toujours prêt à remplir, comme par le passé, les devoirs que lui trace cette solidarité. De pareils devoirs existent même si l'on ne se considère ni ne se proclame comme faisant partie de l'internationale : ce sont, par exemple, les secours en cas de besoin, l'opposition à l'envoi de main-d'uvre étrangère en cas de grèves, les mesures prises pour que les organes du Parti tiennent les ouvriers allemands au courant du mouvement à l'étranger, l'agitation contre les guerres ou menaces de guerre provoquées par les chancelleries, l'attitude à observer, pendant ces guerres, comme celle que les ouvriers allemands surent observer en 1870-71, de façon exemplaire, etc.
En troisième lieu, nos gens se sont laissé octroyer la « loi d'airain des salaires » de Lassalle, qui repose sur une conception tout à fait désuète d'économie politique, à savoir qu'en moyenne l'ouvrier ne reçoit qu'un salaire minimum, et cela parce que, d'après la théorie malthusienne de la population, il y a toujours trop d'ouvriers (c'était là l'argumentation fournie par Lassalle). Or, Marx a abondamment prouvé dans Le Capital que les lois qui régissent les salaires sont très compliquées et que, suivant les circonstances, c'est tantôt tel facteur tantôt tel autre qui domine; qu'il n'y a donc pas lieu de parler d'une loi d'airain, mais, au contraire, d'une loi fort élastique, et qu'il est impossible, par conséquent, de régler l'affaire en quelques mots comme Lassalle se l'imaginait. Le fondement malthusien de la loi que Lassalle a copiée dans Malthus et dans Ricardo [9] (en falsifiant ce dernier) tel qu'on le voit reproduit à la page 5 du Manuel du travailleur, autre brochure de Lassalle, a été abondamment réfuté par Marx dans son chapitre sur l' « accumulation du capital [10]». En adoptant la « loi d'airain » de Lassalle, on fait donc siennes une proposition fausse et une démonstration fallacieuse.
En quatrième lieu, la seule revendication sociale que le programme fasse valoir est l'aide lassallienne de l'État, présentée sous la forme la moins voilée et telle que Lassalle l'a volée à Buchez. Et cela, après que Bracke ait prouvé tout le néant d'une pareille revendication [11]; après que presque tous, sinon tous les orateurs de notre Parti aient été obligés, dans leur lutte contre les lassalliens, de la combattre ! Notre Parti ne pouvait pas tomber plus bas dans l'humiliation. L'internationalisme descendu au niveau d'Armand Goegg [12], le socialisme à celui du républicain-bourgeois Buchez, qui opposait cette revendication aux socialistes pour les combattre !
Au mieux, I' « aide de l'État », dans le sens où Lassalle l'entend ne devrait être qu'une mesure entre beaucoup d'autres, pour atteindre le but désigné ici par les paroles boiteuses que voici : « Préparer la voie à une solution de la question sociale ». Comme s'il y avait encore pour nous, sur le terrain théorique, une question sociale qui n'ait pas trouvé sa solution ! Par conséquent, lorsqu'on dit le Parti ouvrier allemand tend à supprimer le travail salarié, et par là même les différences de classes, en organisant la production, dans l'industrie et dans l'agriculture sur une base coopérative et sur une échelle nationale; il appuiera chaque mesure qui pourra contribuer à atteindre ce but ! - il n'y a pas un lassallien qui puisse avoir quelque chose à y redire.
En cinquième lieu, il n'est même pas question de l'organisation de la classe ouvrière, en tant que classe, par le moyen des syndicats. Et c'est là un point tout à fait essentiel, car il s'agit, à proprement parler, de l'organisation de classe du prolétariat, au sein de laquelle celui-ci mène ses luttes quotidiennes contre le capital, et se forme à la discipline, organisation qui aujourd'hui, même au milieu de la plus redoutable des réactions (comme c'est le cas en ce moment à Paris), ne peut absolument plus être détruite. Étant donné l'importance prise par cette organisation aussi en Allemagne, il serait, à notre avis, absolument nécessaire de la prendre en considération dans le programme et de lui donner si possible une place dans l'organisation du Parti [13].
Voilà le bilan de toutes les concessions que nos gens ont eu la complaisance de faire aux lassalliens. Et qu'est-ce qui leur a été concédé en échange ? Le droit de faire figurer au programme toute une série assez confuse de revendications purement démocratiques dont une partie est uniquement affaire de mode, telle que la « législation directe » qui existe en Suisse et y fait plus de mal que de bien, si tant est qu'elle y fasse quelque chose. Si encore il s'agissait d'administration. De même, il manque la première condition de toute liberté, à savoir que vis-à-vis de chaque citoyen, les tribunaux ordinaires et selon la loi commune. Je n'insisterai pas sur le fait que des revendications comme la liberté de la science et la liberté de conscience figurent dans tout programme libéral de la bourgeoisie et ne sont guère à leur place ici.
L'État populaire libre est devenu un État libre. D'après le sens grammatical de ces termes, un État libre est un État qui est libre à légard de ses citoyens, cest à dire un État à gouvernement despotique. Il conviendrait dabandonner tout ce bavardage sur l'État, surtout après la Commune, qui n'était plus un État, au sens propre. Les anarchistes nous ont assez jeté à la tête l'État populaire, bien que déjà le livre de Marx contre Proudhon [14] et puis le Manifeste Communiste disent explicitement qu'avec l'instauration du régime social socialiste l'État se dissout de lui-même et disparaît. L'État n'étant qu'une institution temporaire, dont on est obligé de se servir dans la lutte, dans la révolution, pour réprimer par la force ses adversaires, il est parfaitement absurde de parler dun État populaire libre : tant que le prolétariat a encore besoin de l'État, ce nest point pour la liberté mais pour réprimer ses adversaires. Et le jour où il devient possible de parler de liberté, l'État cesse d'exister comme tel. Aussi, proposerions-nous de mettre partout à la place du mot État le mot Communauté (Gemeinwesen), excellent vieux mot allemand, répondant au mot français Commune.
L'expression « destruction de toute inégalité sociale et politique » au lieu de « abolition de toutes les différences de classes » est également très suspecte. D'un pays à l'autre, d'une province à l'autre, voire d'un endroit à l'autre, il y aura toujours une certaine inégalité dans les conditions d'existence, inégalité que l'on pourra bien réduire au minimum, mais non faire disparaître complètement. Les habitants des Alpes auront toujours d'autres conditions de vie que les habitants des plaines. Se représenter la société socialiste comme l'Empire de l'égalité est une conception française trop étroite et qui s'appuie sur la vieille devise Liberté, Égalité, Fraternité, conception qui, en ses temps et lieu, a eu sa raison d'être parce qu'elle répondait à une phase d'évolution, mais qui, comme toutes les conceptions trop étroites des écoles socialistes qui nous ont précédés, devrait à présent être dépassée, puisqu'elle ne crée que de la confusion dans les esprits et qu'elle a été remplacée par des conceptions plus précises et répondant mieux aux réalités.
Je termine, bien que presque chaque mot, dans ce programme sans sève ni vigueur, soit à critiquer. Il est conçu de telle sorte qu'au cas où il serait accepté, ni Marx ni moi nous ne pourrions jamais adhérer au nouveau parti fondé sur une pareille base, et que nous serions obligés de réfléchir très sérieusement à l'attitude que nous prendrions - également devant l'opinion publique - vis-à-vis de lui. Songez qu'à l'étranger on nous rend responsables de chaque action, de chaque déclaration du Parti ouvrier social-démocrate allemand. C'est ce qu'a fait par exemple Bakounine dans son livre Politique et anarchie, où nous sommes rendus responsables de chaque parole inconsidérée que Liebknecht a pu prononcer ou écrire depuis la fondation du Demokratisches wochenblatt [15]. Les gens simaginent que nous tirons d'ici les ficelles de toute cette histoire, alors que vous savez aussi bien que moi que nous ne nous sommes presque jamais mêlés des affaires intérieures du Parti et que, si par hasard nous l'avons fait, ce fut uniquement pour redresser dans la mesure du possible les bévues qui selon nous avaient été commises et à vrai dire toujours dans l'ordre de la théorie. Vous verrez vous-mêmes que ce programme marque un tournant qui pourrait fort bien nous forcer à récuser toute solidarité quelle qu'elle soit avec le Parti qui le reconnaît.
En général, il est vrai, le programme officiel d'un parti importe bien moins que ses actes. Mais un nouveau programme est comme un étendard qu'on vient d'arborer au regard de tous, et c'est d'après lui que l'on juge le Parti. Il ne devrait donc en aucun cas marquer un recul, comme c'est le cas, sur le programme d'Eisenach. Il faudrait également songer à ce que les ouvriers des autres pays vont dire de ce programme et à l'impression que l'on aura à l'étranger à voir ainsi tout le prolétariat social-démocrate à genoux devant les lassalliens.
De plus, je suis persuadé qu'une fusion sur une pareille base ne durera pas un an. Vous voyez d'ici les hommes les plus intelligents de notre Parti s'appliquant à répéter par cur les phrases de Lassalle sur la loi d'airain et l'aide de l'État ? Je voudrais vous y voir, vous par exemple ! Et s'ils le faisaient, leurs auditeurs les siffleraient. Or, je suis sûr que les lassalliens tiennent justement à ces parties-là du programme, comme le Juif Shylock tenait à sa livre de chair humaine. La scission viendra, mais nous aurons rendu « honnêtes » les Hasselmann, Hasenclever, Tölke et consorts; nous sortirons de la scission plus faibles et les lassalliens plus forts; notre Parti aura perdu sa virginité politique et ne pourra plus jamais s'opposer franchement aux phrases creuses de Lassalle, puisqu'elles auront, pendant un temps, été inscrites sur son étendard ; et si les lassalliens prétendent alors de nouveau qu'ils sont le parti ouvrier le plus authentique et le seul, et que les nôtres sont des bourgeois, le programme sera là pour leur donner raison. Toutes les mesures socialistes de ce programme sont les leurs; quant à notre Parti, il y a fait figurer uniquement les revendications de la démocratie petite bourgeoise, définie par lui aussi, dans le même programme, comme faisant partie de la « masse réactionnaire » !
J'ai tardé à vous faire parvenir cette lettre, car je savais que, le 1° avril seulement, vous deviez être mis en liberté, en l'honneur de l'anniversaire de Bismarck, et je ne voulais pas l'exposer au risque de la voir saisie en route, au moment où je vous la transmettais en fraude. Mais voici justement qu'arrive une lettre de Bracke, qui, lui aussi, exprime les plus vives objections et veut savoir notre façon de penser. Pour hâter les choses, je vous envoie donc la lettre par son intermédiaire, afin qu'il la lise lui aussi, et que je ne sois pas obligé de répéter toute l'histoire. J'ajoute qu'à Ramm également, j'ai dit ses vérités. A Liebknecht je n'ai écrit que très brièvement. Je ne lui pardonne pas de ne nous avoir pas écrit un seul mot de toute l'histoire avant qu'il ait été en quelque sorte trop tard (alors que Ramm et d'autres croyaient qu'il nous avait tenus tout à fait au courant). Ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'il agit de la sorte, comme en témoigne la correspondance nombreuse et désagréable que Marx et moi nous avons échangée avec lui; mais, cette fois, cela passe les bornes, et nous ne pouvons décidément plus faire route ensemble.
Tâchez de vous arranger de façon à venir ici cet été. Inutile de vous dire que vous descendrez chez moi, et, si le temps le permet, nous irons passer quelques jours au bord de la mer, ce qui vous sera bien nécessaire après avoir entendu toutes ces récriminations.
Bien amicalement vôtre, F. E.
Marx vient de déménager; il habite maintenant 41, Maitland Park Crescent N. W. Londres.
Notes
[1] Hasenclever, W. : un des chefs du parti lassallien. Après la fusion avec les eisenachiens, il remplit plusieurs emplois importants dans le Parti, mais ne joua plus longtemps un rôle important. Il mourut on 1889.
[2] Hasselmann, W. (né en 1844) : Social-démocrate allemand, adhéra au mouvement ouvrier sous l'influence de Lassalle. Avec Schweitzer rédigea le Neuer Sozial-Demokrat. En qualité de représentant de l'Association générale des ouvriers allemands, mena des pourparlers de fusion avec le Parti social-démocrate ouvrier ; plus tard repoussa la proposition de rédiger avec Liebknecht le Vorwaerts (En avant) et fonda son propre organe Die Rote Fahne (le Drapeau rouge) dans lequel il défendit des conceptions proches de lanarcho-syndicalisme et combattit la politique du Parti. Au congrès de Bade en 1880, il fut exclu du Parti pour ses manuvres de scission, après quoi émigra en Amérique.
[3] Tölke (1817-1883) : Un des chefs du Parti lassallien. Demeura toute sa vie dans les rangs du Parti social-démocrate allemand, mai ne joua aucun rôle important dans la direction du Parti unifié.
[4] C'est le surnom que donnaient les lassalliens aux membres du Parti ouvrier social-démocrate. A la suite d'un manifeste lancé par Liebknecht et Bebel (23 juin 1869): « Nous verrons qui vaincra de la corruption ou de l'honnêteté. »
[5] En avril 1875, Bracke écrit à Sorge sur la situation du Parti allemand : « Nous avons ici l'unité, mais au diable toute cette histoire ! Les lassalliens ont roulé les nôtres comme il faut, et il sera difficile de maintenir la position de l'Internationale. A Londres, on est [c'est-à-dire Marx et Engels] également mécontent que Liebknecht, Geib, Motteler, et autres aient donné leur agrément à un tel galimatias (Wischt- Waschi Programm) ».
[6] On retrouve cette critique d'Engels dans une lettre du 28 Octobre 1882 : « On rêve toujours que se réalisera la phrase sur la « masse réactionnaire unique » : tous les partis officiels se réunissent en un bloc ici; tandis que les socialistes forment leur colonne là. Une bataille décisive a lieu, et c'est la victoire sur toute la ligne d'un coup. En réalité, les choses ne se passent pas aussi simplement. En fait, tout au contraire, la révolution commence par ceci que la grande majorité de la nation et aussi des partis officiels s'unissent contre le gouvernement, qui reste ainsi isolé, et le renversent, et c'est seulement alors qu'il devient possible de raffermir notre pouvoir. Si nous voulions commencer la révolution par la fin, cela ne nous porterait pas bonheur. »
[7] Vers 1875, journal d'opposition, organe des petits bourgeois démocrates de I'Allemagne du Sud, se plaçant à un point de vue réformiste dans les questions ouvrières. Organe du camp libéral de la grande bourgeoisie allemande.
[8] La guerre franco-allemande de 1870-1871.
[9] Ricardo, David (1772-1823) : Économiste anglais. Avec Adam Smith dont l'étude l'amena à l'économie politique, il fut le représentant le plus considérable de l'école bourgeoise classique. Ricardo a développé la théorie suivant laquelle le travail humain est la seule source de la valeur des marchandises déterminée par la quantité du temps de travail. Dans son ouvrage principal Principes de l'économie politique et de l'impôt (1817), il découvre l'antagonisme économique des classes et l'exprime clairement. L'ordre social fondé sur la propriété privée lui apparaît comme immuable. Ricardo, riche bourgeois londonien, fut le représentant conséquent des intérêts du capital bancaire et de la grande bourgeoisie industrielle.
[10] Karl MARX : Le Capital, livre premier, t. III.
[11] Dans une brochure : Les Propositions lassalliennes.
[12] Goegg, Armand (1820-1897) : chef bourgeois démocrate de Bade qui prit une grande part à la révolution de 1848-49. Entre 1860-1870, il se consacra à la propagande pacifiste et fut un des chefs de la Ligue de la paix et de la liberté.
[13] Voir à ce sujet les matériaux concernant la théorie syndicale de Marx et Engels : Salaire, prix et profit (Annexes).
[14] Karl Marx : Misère de la philosophie. Réponse à la « philosophie de la misère » de M. Proudhon.
[15] Le Demokratisches Wochenblatt avait été fondé à Leipzig en 1867 par les eisenachiens antérieurement à leur séparation d'avec le Sächsische Volksparlei (Parti populaire saxon). Wilhelhm Liebknecht en prit la direction le 1° janvier 1868. Ce journal fut remplacé par la suite par le Volkstaat.