1947

Série de tracts ronéotés recto-verso
Parution toutes les deux semaines
Il s'agit de la période précédant directement le déclenchement de la grève Renault d'avril 47


La voix des travailleurs de chez Renault nº 5

Barta

16 avril 1947


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IL FAUDRA PAYER.

Depuis plus de 2 ans, la direction de notre usine aidée par les organisations syndicales, nous a préconisé l'augmentation de la production, comme seule possibilité de l'augmentation de nos salaires.

A la Régie la production journalière est passée de 66,5 véhicules en nov. 45 à 166 véhicules en nov. 46. Soit une augmentation de 150%. Si les salaires avaient augmenté dans les mêmes proportions le salaire moyen qui était de 6.410 frs par mois en déc. 45 aurait du être de 14.000 frs environ en déc. 46 et actuellement de I7.500 à I8.000 frs (184,6 véhicules).

Au lieu de cela M. Lefaucheux nous explique dans son bulletin qu'il s'est montré "particulièrement réticent devant les demandes d'augmentation de salaires".

Ainsi la direction nous a dupé en nous préconisant le salaire au rendement. Et la C.G.T. s'est rendu complice de cette duperie.

Monsieur Lefaucheux nous fait part de ses difficultés financières pour justifier sa réticence aux demandes d'augmentation de salaires Alors qu'en 1945 avec une production d'environ 50 véhicules la Régie avouait 300 millions de bénéfices dont elle répartissait 110 millions à son personnel, aujourd'hui, avec une production qui atteint 184 véhicules on nous annonce du déficit. Lefaucheux le justifie par les augmentations de matières premières.

Devant les trusts de la sidérurgie qui eux ont les moyens de faire des sacrifices, M. Lefaucheux a dû capituler, Mais devant les ouvriers dont les salaires sont déjà réduits à la plus simple expression, il entend ne pas céder et rester "réticent" à toute augmentation. Pour augmenter les ouvriers il n'y a pas d'argent.

Mais chacun a pu se rendre compte que depuis quelque temps, de nombreuses machines neuves sont mises en activité. C'est bien avec les millions qu'elle nous vole en réduisant toujours davantage notre pouvoir d'achat que la direction achète ces machines.

C'est là qu'elle dissimule ses bénéfices. L'augmentation de la production permet à la direction de renouveler son outillage.

Nous voulons travailler pour vivre et non pour accroître le capital de la Régie. Quand la direction achète des matières premières, quand elle achète des machines, elle les paye.

Si elle veut notre force de travail il faut qu'elle la paye.

Pas d'augmentation. Pas de travail.


SECURITE SOCIALE

La C.G.T. et la C.F.T.C. ont engagé la bataille électorale pour la sécurité sociale. De nombreux ouvriers se disent : "Il va falloir encore voter, pourquoi ?"

La Bourgeoisie aidée par son Etat a réduit notre pouvoir d'achat à un tel point que tous nous vivons au jour le jour.

La Sécurité Sociale qui garantirait l'ouvrier contre la misère, le chômage ou la maladie serait une belle conquête sociale.

Mais actuellement, comment parler de sécurité pour les travailleurs quand l'ouvrier en bonne santé qui travaille à la cadence maximum avec de longues journées n'arrive pas à joindre les deux bouts.

"La Sécurité Sociale c'est la liberté garantie par la suppression du souci du lendemain" dit un tract de la C.G.T. "Vous n'aurez pas le minimum vital, peu importe vous avez la Sécurité Sociale".

Nous faire croire, dans le but d'obtenir quelques places dans une administration qu'une loi bourgeoise peut nous garantir "contre le souci du lendemain à un moment ou 1'inflation ruine chaque jour davantage les classes pauvres, où le chômage et la guerre sont de plus en plus menaçants, c'est le comble de l'impudence et du cynisme.

La C.F.T.C. et la C.G.T. essaient de nous détourner de nos revendications en nous donnant un os à ronger.

Nous ne voulons pas d'aumônes de la Sécurité Sociale ; nous exigeons un salaire qui nous permette de vivre.


ATELIER 17 (matrices)

Dans ce secteur les ouvriers qui sont presque tous des professionnels avaient revendiqué depuis 3 mois l'augmentation des salaires. N'ayant toujours rien des camarades amenèrent des bons de paye de chez Citroën mentionnant de 88 à 95 frs de l'heure pour les P3, alors que la Régie donne environ 70 frs. N'ayant aucune réponse ils cessèrent spontanément le travail. Les délégués prétendirent que ce n'était pas la volonté de la majorité de faire grève. Sur l'initiative d'un ouvrier on procéda à un vote ;

Pour la reprise du travail :    46

Contre la reprise du travail : 86

Le lendemain le citoyen Plaisance vint faire un discours pour inviter les ouvriers à reprendre le travail. Les ouvriers "dans la ligne de la C.G.T." ayant été sermonnés, un autre vote fut organisé qui donna :

71 pour,

66 contre.

C'est alors que Plaisance demanda quels étaient les dirigeants de la grève. Evidemment il n'y en avait pas puisque tout le monde avait débrayé spontanément.

N'ayant qu'une faible majorité et pas de direction, les ouvriers partisans de la grève reprirent le travail.


Dans "l'Unité", la section syndicale proteste parce qu'aux "automotrices" on  a réduit la quinzaine de travail de 108 à 96 heures. Pour les bureaucrates du syndicat, 48 h. par semaine, ce n'est pas assez.   


SECTEUR COLLAS

A la suite de la pétition réclamant les 10 frs, le délégué Facompré a accepté de poser la revendication à la direction. Le chef de département. s'est retranché derrière la direction. La direction a répondu qu'étant donné les nombreuses revendications qu'elle avait reçues, une augmentation était a l'étude. (il s'agirait d'une prime de 3 à 4 frs).

Des camarades sont retournés voir le délégué pour monter de nouveau à la direction. Avant d'avoir pu joindre le chef du département le délégué a répété ce qu'il avait dit lors du débrayage : "10 frs de l'heure vous ne les aurez pas" et il a ajouté : "D'ailleurs vous êtes des troublions et des diviseurs".

Ainsi la direction "étudie" pendant que Lefaucheux est "réticent" et les délégués "n'y croient pas".

Dans ces conditions il apparait clairement que nous ne devons compter que sur nous-mêmes.

Seule l'ACTION DIRECTE peut nous donner satisfaction et cette action c'est à nous de la décider et de l'organiser dans des réunions générales de tous les ouvriers syndiqués et non syndiqués.


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