1942 |
LA LUTTE de CLASSES - n° 1
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Soixante-dix années de parlementarisme ont pu cacher en partie aux ouvriers et paysans de France la nature rapace et sans scrupules de leur impérialisme ; les événements actuels dévoilent complètement son rôle vis-à-vis de la "nation".
Le grand Capital, qui exploitera la France aussi longtemps que les ouvriers et les paysans ne se seront pas emparés des moyens de production, considère la "nation" comme un simple moyen : instrument de pillage mondial quand il est assez fort pour se mesurer directement avec les autres brigands impérialistes (conquête de colonies), ou monnaie d'échange, quand il en est réduit à acheter la protection d'un impérialisme plus fort.
C'est dans cette dernière situation que se trouve aujourd'hui l'impérialisme français. Si son serviteur Laval veut fournir à l'Allemagne des ouvriers français c'est pour que la guerre impérialiste de Hitler continue de faire marcher les affaires de la bourgeoisie française. Malgré sa défaite, l'impérialisme français entend participer au pillage, au moins indirectement, en attendant mieux. La relève, si les ouvriers laissent faire, n'est qu'un début...
Là-dessus Radio-Londres pousse des cris indignés contre les esclavagistes qui décrètent le travail obligatoire pour contraindre les ouvriers français d'aller travailler en Allemagne. Mais ce flot d'indignation, qui pourrait faire croire qu'une telle chose est incompatible avec la démocratie anglaise, n'empêche pas qu'avec ou sans "démocratie", c'est le caractère propre du grand capital monopoleur d'obliger les peuples les plus faibles qui tombent sous sa domination directe ou indirecte de participer à ses brigandages et de faire peser sur eux les charges principales de la guerre. L'Angleterre n'oblige-t-elle pas des dizaines de peuples (Indes, Irlande, etc...) à participer malgré eux au conflit ?
La riposte ouvrière contre les manœuvres Laval-Hitler est allée dans beaucoup d'usines, des deux côtés de la ligne de "démarcation", jusqu'à la lutte ouverte et à la grève. Mais il est clair que dans la situation actuelle cela ne pouvait aller plus loin, à moins que le prolétariat ait pu mener la bataille DECISIVE. Aussi la principale résistance des ouvriers a-t-elle consisté dans le refus de signer les engagements "volontaires".
Les 17.000 signatures "volontaires" n'ont été obtenues que par les plus ignobles chantages. Et quoique la classe ouvrière ne soit pas encore en mesure de riposter ouvertement, ce serait une grave erreur que de se dire : "Alors, à quoi bon résister, ils nous enverront de force et nous perdrons les avantages promis". Les dits avantages ne sont en réalité que le strict nécessaire, indispensable à l'ouvrier pour qu'il fournisse un bon rendement. Si l'emploi de la force donnait aux deux compères impérialistes Laval-Hitler le même résultat, se donneraient-ils tant de mal pour organiser la tromperie de la relève ?
Dans beaucoup de cas, des jeunes ouvriers se sont engagés dans l'armée, la marine ou dans des organisations paramilitaires, pensant ainsi se soustraire à la "relève" et à l'étreinte de plus en plus terrible dans laquelle sont enfermés les travailleurs. Qu'ils prennent garde ! Le Capitalisme monopoleur ne permet à personne d'échapper à son "Talon de fer", sinon pour en faire des gardes-chiourmes ou de la chair à canon...
Jeunes ouvriers, dans l'Allemagne impérialiste il y a, comme en France, un prolétariat qui, s'étant remis moralement de la défaite terrible que lui infligea le fascisme en 1933, mène une lutte sans merci contre Hitler. Que ceux qui sont envoyés de force partent avec la conviction que, leur lutte, soudée à celle des ouvriers allemands contre la guerre impérialiste, délivrera l'Europe du capitalisme oppresseur et des guerres. Ne partez pas abattus, ne vous laissez pas isoler : la différence des langues est un obstacle qui peut être surmonté par une ferme volonté de s'entendre avec ses frères de classe.
L'impérialisme, en envoyant par fournées les hommes à la boucherie, est obligé de recourir au travail des femmes à l'arrière : de ce fait, le rôle de la femme dans la lutte contre la guerre prend une importance de plus en plus grande. L'éducation révolutionnaire et l'organisation des femmes sont des facteurs décisifs dans la lutte contre la guerre.
Les syndicats ouvriers ont été détruits. Pour défendre vos droits, remplacez-les par des COMITES D'USINES illégaux.
Pour la bourgeoisie, la "relève" n'est qu'une étape. Quoique le peuple français ait déjà subi une grande saignée, des sacrifices de plus en plus grands sont exigés de lui par l'impérialisme français qui veut l'entraîner de nouveau dans le conflit, bien que dans le camp adverse.
Ouvriers, ouvrières, il faut s'arrêter sur la pente et se préparer à de nouveaux combats. FAISONS POUR NOUS-MEMES VOLONTAIREMENT UNE PARTIE SEULEMENT DES SACRIFICES QUE L'IMPERIALISME NOUS OBLIGE A FAIRE POUR SES BRIGANDAGES, et la classe ouvrière VAINCRA !
ECHEC A LA RELEVE IMPERIALISTE !
"Mais ce n'est que lorsque vous serez prêts à faire pour votre propre cause et votre libération dans la lutte contre le Capital, ne fût-ce qu'une partie des sacrifices que vous faites en ce moment sur les champs de bataille pour les intérêts des capitalistes, QUE VOUS SEREZ EN ETAT DE METTRE FIN A CETTE GUERRE et de poser les bases solides d'une paix durable qui d'esclaves du Capital vous transformera en HOMMES LIBRES."
(Projet de Manifeste de Lénine à Zimmerwald, 1915)