1937 |
Un Titan de la Révolution, LÉON DAVIDOVITCH TROTSKY (brochure non-datée, vers 1937, Editions de la Nouvelle Revue Critique, 11 rue François Mouthon à Paris 15ème) |
Un titan de la révolution,
Léon Davidovitch Trotsky
Chef de la Révolution d'Octobre, Créateur de l'Armée Rouge
Le procès des dirigeants du Soviet dura un mois et fut exceptionnel, grâce à l'attitude des inculpés. Ce n'est qu'en janvier 1907 que le convoi des déportés se met en route vers la Sibérie, vers le cercle polaire. Mais les policiers du tsar n'avaient pas compté avec la farouche volonté de lutte du jeune révolutionnaire. De nouveau, par un raid hardi qui mériterait l'admiration de tous les sportifs, il réussit à échapper à la geôle sibérienne.
Après 33 jours de voyage le convoi arrive à Bérézov ; de là il y a encore environ 500 km à faire jusqu'au but du voyage. On laisse les prisonniers se promener en toute liberté dans le bourg ; d'ici, loin des confins de la civilisation, aucune évasion n'était à craindre ; toute tentative d'évasion était condamnée d'avance à un échec. Mais Trotsky ne recule pas devant l'impossible. Il se lance sur un traîneau de rennes, guidé par un vieux iakout ivrogne, à travers le désert de glace et de neige – et cela en plein hiver – au mois de février.
La police abandonne rapidement toute poursuite : il y a 99 chances sur cent que l'évadé périsse. Mais à un Trotsky une chance sur cent suffit. Il traverse 700 km de la taïga sibérienne, ensevelie dans la neige, où sur des milliers de kilomètres ne se trouve pas un Russe, pas un policier en conséquence, et où, de temps en temps se dressent seulement quelques iourtes d'Ostiaks hivernants.
Dans l'Oural, il se fait passer pour le membre d'une expédition polaire, alors en Sibérie, et continue sa fuite vers l'Occident. Il arrive à Pétrograd, d'où il se rend en Finlande où se trouvent déjà Lénine et Martov. Il rend visite à tous les deux. La révolution de 1905 avait eu comme résultat entre autres, la fusion des deux fractions au congrès de Stockholm en avril 1906. Mais cette fusion était artificielle et ne pouvait durer. D'un côté les bolchéviks se préparent déjà aux batailles futures, tandis que de l'autre, les menchéviks regrettent même leur « folie révolutionnaire » de 1905 et glissent rapidement vers la droite.
Quand Trotsky arrive en Finlande, cette fusion est déjà bien comprise. Il passe quelques semaines en Finlande, avec sa femme et son enfant, né pendant qu'il était en prison, et après c'est le départ pour l'étranger. Ce n'est que dix ans plus tard qu'il foulera de nouveau le sol russe.
A peine arrivé à l'étranger, Trotsky plongea immédiatement dans le travail révolutionnaire de l'émigration. Le congrès du parti social-démocrate russe, en 1907, a lieu à Londres... dans une église socialiste. Ce ne sera pas la seule curiosité de ce congrès, car, au beau milieu du congrès, on s'aperçoit que la caisse du parti est à sec et que tout l'argent, tant pour le voyage de retour des délégués que pour la continuation du congrès même, manque. Que faire ? Une solution inattendue se présenta. La révolution de 1905 avait eu un profond écho dans le milieu des libéraux anglais. Grâce à cette sympathie les socialistes russes purent sortir de l'embarras que leur occasionnait le manque d'argent. Trotsky écrit :
« Un des libéraux anglais consentit à la révolution russe un emprunt, qui, je m'en souviens, fut de trois mille livres sterling. Mais il exigea que la reconnaissance fût signée par tous les délégués au congrès. L'Anglais reçut un document sur lequel figuraient plusieurs centaines de signatures, tracées avec les caractères qui appartiennent à toutes les langues de la Russie. Il eut, cependant, à attendre longtemps le versement de la somme marquée sur cet effet. Pendant la réaction et la guerre, le parti ne pouvait penser à payer de pareilles sommes. C'est seulement le gouvernement soviétique qui racheta la traite signée par le congrès de Londres. La révolution fait honneur à ses engagements, bien que d'ordinaire avec un certain retard. »
Ainsi il se fit que le congrès socialiste put terminer ses travaux grâce à l'argent d'un bourgeois anglais qui, bien que remboursé en 1917 dût, à cette date, regretter son acte, de même que le fait que ses débiteurs soient dans la possibilité de le rembourser.
A ce congrès, Trotsky fit deux rencontres intéressantes : celle de Gorki et de Rosa Luxembourg, la socialiste polonaise qui jouera un grand rôle dans le parti socialiste.
De Londres, Trotsky, après un court séjour à Berlin et en Bohême, se rend au congrès de l'Internationale socialiste qui a lieu cette même année, à Stuttgart.
En Russie, le mouvement ouvrier est en reflux. La répression de la réaction s'abat durement et reprend une à une les quelques libertés que les ouvriers russes ont conquises de haute lutte pendant les années 1905-1906.
Mais l'Internationale socialiste se trouve encore sous l'influence de ces événements. Le congrès de Stuttgart se tiendra sous le signe de l'offensive de l'aile gauche dans l'Internationale. A côté de la fraction bolchévik se tiennent d'autres révolutionnaires, comme Karl Liebknecht, Rosa Luxembourg, Christian Rakovsky, etc. C'est à Stuttgart que les résolutions les plus progressives et les plus révolutionnaires de la lutte des travailleurs contre la guerre seront votées. C'est aussi à Stuttgart que Karl Liebknecht lance son cri de guerre :
« L'ennemi principal est dans ton propre pays. Le prolétaire doit lutter contre sa propre bourgeoisie. »
Sept années plus tard, en août 1914, peu de chefs « socialistes » se rappelleront ces paroles et les résolutions votées au congrès de Stuttgart. Trotsky se trouvera dans la minorité révolutionnaire qui, elle, n'a pas oublié.
En octobre 1907, Trotsky s'installe à Vienne. Ce fait est plutôt étonnant, car l'émigration russe se trouve concentrée en Suisse et à Paris. Trotsky donne lui-même la réponse dans ses mémoires, où il dit :
« C'est qu'en cette période j'étais surtout porté vers la vie politique allemande. Je n'aurais pu m'établir à Berlin à cause de la police. Nous optâmes donc pour Vienne »
Il s'inscrit au parti social-démocrate autrichien et suit avec assez de régularité les réunions socialistes. Il fait, naturellement, connaissance avec les chefs socialistes autrichiens, mais ne sympathise guère avec eux. Ceux qui connaissent les chefs de l'austro-marxisme ne peuvent guère s'étonner de ce fait.
Trotsky dit avec mépris d'eux qu'ils vivaient des intérêts du Capital.
Les années de 1907 à 1912 sont les pires pour l'émigration russe. La contre-révolution est déchaînée en Russie, le mouvement ouvrier se réduit aux cadres révolutionnaires les plus sommaires. Cette situation du mouvement ouvrier en Russie a, naturellement, sa répercussion immédiate à l'étranger, dans l'émigration russe. Ces années sont encore davantage qu'auparavant des années de luttes fractionnelles, de querelles et de tractations entre les différentes fractions et sous-fractions de l'émigration.
C'est dans ces années que Trotsky accentue le plus sa position de centriste et de conciliateur. Il attaque à droite et à gauche, ce qui lui vaut le mécontentement conjugué des menchéviks et des bolchéviks. Sa critique est dure pour les uns et pour les autres. A l'occasion du congrès de Copenhague il publie un article dans le Vorwaerts sur la social-démocratie russe en distribuant ses coups, comme d'habitude, aussi bien à l'aile droite qu'à l'aile gauche. Cet article produit aussi bien chez les bolchéviks que chez les menchéviks une grande agitation. Plékhanov, le menchévik, organise une sorte de « conseil de discipline », contre Trotsky ; Zinoviev, le bolchévik, demande aussi des sanctions. D'autres révolutionnaires comme Riazanov, Lounatcharsky défendent Trotsky et la délégation russe après avoir pris connaissance de l'article rejette à une grosse majorité toute demande de sanction.
Le temps sert à étudier le passé et surtout à tirer les enseignements de la révolution de 1905. Trotsky fait dans l'émigration russe plusieurs conférences à ce sujet. A partir d'octobre 1908, il édite à Vienne un journal russe, intitulé Pravda. Son meilleur collaborateur et compagnon de cette époque est A. Joffé qui restera son fidèle partisan jusqu'à sa mort. Quand Trotsky est exclu du parti communiste sur l'ordre de Staline, Joffé, atteint d'une maladie incurable, se suicide en signe de protestation.
Mais l'activité journalistique de Trotsky ne se borne pas seulement à l'édition de la Pravda qui, dans son meilleur temps, ne paraît que bi-mensuellement. Il aide l'union illégale des marins de la mer Noire à confectionner leur journal et collabore au journal radical la Kievskaïa Mysl, collaboration qui lui permet de gagner sa vie.
Trotsky n'a toujours pas perdu l'espoir de voir se réaliser un jour l'unification des deux fractions. Il n'est pas le seul alors à avoir cette position. Rosa Luxembourg, en 1911, écrit dans le même sens et beaucoup de militants ouvriers en Russie ne s'embarrassent guère de ces distinctions de fraction. On verra, en 1917, que la plupart des sections de province du parti social-démocrate se composaient de bolchéviks et de menchéviks unifiés.
Toujours hypnotisé par son désir d'unification, Trotsky convoque, en août 1912, à Vienne, une conférence de toutes les fractions de la social-démocratie russe. Il espère pouvoir persuader Lénine de participer à cette conférence, mais celui-ci malgré les fortes tendances conciliatrices à l'intérieur de la fraction bolchévik, refuse d'envisager, une fois de plus, l'unification. Il s'oppose de toutes ses forces à l'unification, considérant une fusion des deux tendances comme un mariage entre l'eau et le feu.
Et ainsi Trotsky se trouve à cette conférence seul avec les menchéviks et quelques petits groupes bolchéviks dissidents. C'est ce qu'on appelle depuis le fameux « bloc d'août » qui, de l'aveu même de Trotsky, était un « bloc sans principes », étant donné qu'aucune base politique commune n'existait entre lui et les menchéviks. Dans les premières années de la lutte de Staline contre Trotsky, le premier utilisera le « bloc d'août » comme argument suprême pour prouver l'activité anti-bolchévik de Trotsky.
Cette mésaventure refroidit un peu les efforts unificateurs de Trotsky et c'est donc avec empressement qu'il accepte la proposition de la Kievskaïa Mysl d'aller comme correspondant de guerre dans les Balkans. Trotsky s'éloigne ainsi pour quelque temps de la vie intérieure de l'émigration russe. Les années 1912-1913 le trouvent parcourant la Bulgarie, la Serbie et la Roumanie.
Le déclenchement de la guerre mondiale le surprend à Vienne. Trotsky, dans Ma Vie, a écrit quelques lignes excellentes sur l'élan patriotique qui s'empara à cette occasion des peuples d'Europe :
« L'élan patriotique des ouvriers en Autriche-Hongrie fut, de tous, le plus inattendu. Qu'est-ce qui pouvait bien pousser l'ouvrier cordonnier de Vienne, Pospezil, moitié Allemand, moitié Tchèque, ou notre marchande de légumes, Frau Maresch, ou le cocher Frankl, à manifester sur la place, devant le ministère de la Guerre ? Une idée nationale ? Laquelle ? L'Autriche-Hongrie était la négation même de l'idée de nationalité. Non, la force motrice était ailleurs.
Il existe beaucoup de gens de cette sorte, dont toute la vie, jour après jour, se passe dans une monotonie sans espoir. C'est sur eux que repose la société contemporaine. Le tocsin de la mobilisation générale intervient dans leur existence comme une promesse. Tout ce dont on a l'habitude et la nausée est rejeté ; on entre dans le royaume du neuf et de l'extraordinaire. Les changements qui doivent se produire par la suite sont encore moins prévisibles. Peut-on dire que cela ira mieux ou plus mal ? Mieux, bien sûr... Comment Pospezil trouverait-il pire que ce qu'il a connu en temps normal ? »
Une fois de plus, Trotsky est arraché brutalement à ses préoccupations. Sans attendre une minute il doit quitter l'Autriche pour la Suisse devant la menace du camp d'internement. Il est forcé de laisser, à Vienne, sa bibliothèque, ses archives, ses manuscrits. La vie de révolutionnaire professionnel connaît souvent de pareils à-coups ; Trotsky avait déjà l'habitude.
Ni Lénine ni Trotsky ne s'étaient fait des illusions sur la valeur révolutionnaire de la social-démocratie internationale. Mais l'étendue de son effondrement les surprend tout de même ; ils s'attendaient à une carence, mais non pas à une trahison de telle envergure.
Trotsky note dans son autobiographie :
« Quand on reçut en Suisse le numéro du "Vorwaerts" où il était rendu compte de la séance du Reichstag qui avait lieu le 4 août, Lénine décida sans hésiter que c'était une contrefaçon, un document inventé par le G.Q.G. allemand pour tromper et terrifier l'ennemi. Telle était encore – en dépit de la faculté critique de Lénine, – la foi que l'on gardait à la social-démocratie allemande. »
La deuxième Internationale s'est écroulée ; Lénine et Trotsky s'en rendent rapidement compte et songent déjà à la remplacer par une autre.
Déjà le 11 août, Trotsky écrit :
« C'est seulement un réveil du mouvement révolutionnaire socialiste, – lequel doit prendre immédiatement des formes extrêmement violentes – qui jettera les bases de la nouvelle Internationale. Les années qui viennent seront l'époque de la révolution sociale. »
Un souffle de chauvinisme social-patriote passe à travers les rangs socialistes et n'épargne pas non plus le socialisme russe. A l'exception de Martov tous les menchéviks prennent place dans le camp du chauvinisme délirant ; Kropotkine, le leader de l'anarchisme russe, en fait autant et même les rangs des bolchéviks ne sont pas épargnés. Toutefois la fraction bolchévik est le seul bastion qui résiste au social-patriotisme. Les députés bolchéviks à la Douma seront déportés en Sibérie pour leur attitude résolument révolutionnaire devant la guerre. Lénine lance immédiatement les mots d'ordre du défaitisme révolutionnaire, ce qui veut dire : « Fraternisation des soldats par-dessus les tranchées » et « transformation de la guerre impérialiste en guerre civile ».
Trotsky sans hésitation se range dans le camp des internationalistes et combat de toutes ses forces le social-patriotisme. Bientôt la voix de Karl Liebknecht se lève en Allemagne ; il n'a pas oublié ce qu'il a prêché au congrès de Stuttgart en 1907. Pour lui l'ennemi reste dans son propre pays et au lieu d'inciter, à l'instar des social-patriotes, les ouvriers allemands d'aller massacrer les ouvriers français, il leur rappelle qu'il y a une tâche plus urgente : abattre l'impérialisme allemand.
En Suisse, Trotsky écrit un livre intitulé : La Guerre et l'Internationale dans lequel il fustige l'attitude de traître de la social-démocratie allemande.
Ce livre lui vaut une condamnation par contumace à la prison par un tribunal allemand ; ce fait n'empêchera pas d'interdire l'entrée en France de ce livre.
Le 19 novembre 1914, Trotsky pénètre en France avec sa carte de correspondant de guerre de la Kievskaïa Mysl. Il se fixe d'abord avec sa famille à Sèvres dans la petite maison qu'un peintre italien met à sa disposition pendant quelque temps. Plus tard il habitera rue Oudry, à Paris.
Dès son arrivée à Paris, il collabore au journal socialiste russe Naché Slovo, qui alors s'appelle encore Goloss. Ce journal paraît grâce aux efforts désespérés d'Antonov-Ovséenko qui se met en quatre pour trouver l'argent nécessaire pour la parution régulière du journal.
Trotsky devient immédiatement rédacteur en chef et directeur politique de Naché Slovo qui par son attitude internationaliste s'attire aussi bien les foudres de l'ambassade russe que ceux de la presse française bien pensante. Léon Davidovitch cherche naturellement et immédiatement une liaison avec le cercle de ceux qui, à travers vents et marées, sont restés internationalistes et antimilitaristes. Il fréquente ainsi le Groupe de la « Vie Ouvrière » dirigé par Monatte où se rencontrent, Quai Jemmapes où à la Grange-aux-Belles, les quelques révolutionnaires fidèles à leurs idées.
En septembre 1915, sur l'initiative des socialistes italiens une conférence internationale doit avoir lieu en Suisse. C'est le leader socialiste de Berne, Grimm, qui est chargé de l'organisation effective de la Conférence. Elle se tiendra à dix kilomètres de Berne dans un petit village qui s'appelle Zimmerwald. Quatre voitures suffisent pour transporter tous les internationalistes au lieu de la réunion. Trotsky s'était rendu à la conférence avec les Français Merrheim et Bourderon. C'est lui qui se charge de la rédaction du manifeste de la conférence, autour duquel Lénine, à l'extrême-gauche, et les pacifistes à droite, se livrent des batailles rangées. Une année plus tard, aussi en Suisse, à Kienthal cette fois-ci, une deuxième conférence, internationaliste se tiendra ; à celle-ci seule la gauche révolutionnaire qui s'était manifestée à Zimmerwald participera.
Trotsky ne pourra y prendre part, car déjà le sort lui prépare de nouvelles pérégrinations à travers le globe terrestre.
Décidément, le Naché Slovo devient la bête noire de l'ambassade russe à Paris ; son influence rayonne de plus en plus loin ; on le cite dans la presse allemande, italienne et partout où quelques révolutionnaires ont survécu au déluge nationaliste.
Un jour, l'ambassade exaspérée décide d'en finir avec cet adversaire gênant. Grâce au travail d'un provocateur auprès d'un régiment russe, en caserne à Marseille, une petite révolte qui cause la mort d'un colonel se produit. On s'arrange pour mettre la responsabilité de la mutinerie au compte du Naché Slovo.
Le journal est interdit et Malvy, ministre de l'Intérieur, prend un arrêté d'expulsion contre Trotsky. On signifie à Trotsky qu'il devra immédiatement quitter le territoire français pour un pays de son choix. Cette liberté de choix n'est qu'une ironie de la police française, car immédiatement les gouvernements italien et anglais font savoir qu'ils n'acceptent pas ce dangereux individu sur leur territoire. Pour se rendre en Hollande ou dans les pays scandinaves Trotsky est forcé de traverser l'Angleterre, donc impossibilité de s'y rendre. Reste la Suisse. Trotsky fait la demande d'entrée, mais sur une démarche du gouvernement russe, appuyé par tous les gouvernements alliés, le gouvernement fédéral lui refuse l'accès sur le territoire de la Confédération helvétique. Déjà à cette époque la planète est sans visa pour ce révolutionnaire. La police française l'avise alors qu'il devra se rendre en Espagne. Trotsky refuse et sera forcé de faire le voyage vers la péninsule ibérique sous la garde de deux agents de la sûreté. Mais l'Espagne non plus ne veut pas s'embarrasser d'un indésirable. Après un court séjour à Madrid il est arrêté et fait ainsi connaissance avec la prison-modèle de Madrid. De là on le transporte à Cadix où on lui déclare qu'il sera embarqué sur un vapeur en partance pour La Havane. Trotsky désire aussi peu de se rendre à La Havane qu'au Pôle Nord. Il fait l'impossible pour empêcher son départ, se démène, télégraphie à toutes les personnes qu'il connaît. Son cas, pour une intervention d'un député de gauche, est discuté au Parlement espagnol. La presse s'empare de l'affaire et finalement on l'autorise à se rendre à Barcelone, où avec sa famille arrivée de France il s'embarquera pour New-York. New-York est tout de même préférable à La Havane et l'Espagne ne s'intéresse qu'à une seule chose : se débarrasser de ce dangereux révolutionnaire. New-York devait être l'avant-dernière étape avant la Révolution.